Origine
Le style musical achewiq est une expression artistique profondément enracinée dans la culture kabyle, une région montagneuse du nord de l’Algérie. Cette forme musicale est un témoignage vibrant de l’âme collective des Kabyles, un peuple amazigh qui a su préserver ses traditions et son identité malgré les influences extérieures et les bouleversements historiques. L’achewiq, souvent interprété lors de cérémonies et d’événements sociaux, puise ses origines dans les récits oraux et les chants traditionnels qui ont traversé les âges, transmettant des histoires, des légendes et des valeurs communautaires de génération en génération.
Historique
L’histoire de l’achewiq remonte à plusieurs siècles, bien avant l’arrivée des influences arabes et coloniales. Les premiers chants achewiq étaient probablement improvisés par des bergers et des agriculteurs dans les montagnes, servant à exprimer des sentiments personnels, des réflexions philosophiques ou des observations sur la nature et la vie quotidienne. La musique traditionnelle kabyle, dont l’achewiq fait partie intégrante, a toujours joué un rôle crucial dans la préservation de la langue et de la culture amazighes.
Au fil des siècles, l’achewiq a évolué, intégrant des éléments de diverses influences culturelles tout en conservant son essence originelle. Pendant la colonisation française, la musique kabyle, y compris l’achewiq, est devenue un symbole de résistance culturelle. Des artistes tels que Slimane Azem et Cheikh El Hasnaoui ont utilisé la musique pour exprimer des sentiments nationalistes et revendiquer l’identité kabyle.
Après l’indépendance de l’Algérie en 1962, l’achewiq a connu un renouveau, avec une nouvelle génération d’artistes qui ont modernisé le style tout en restant fidèles à ses racines. La musique kabyle, et l’achewiq en particulier, a continué à évoluer, intégrant des influences modernes tout en restant un pilier de la culture kabyle.
Instruments
L’achewiq est typiquement interprété avec un ensemble d’instruments traditionnels qui confèrent à la musique une texture unique et reconnaissable. Parmi ces instruments, on retrouve :
1. La mandole : Un instrument à cordes pincées d’origine nord-africaine, similaire au luth, qui produit des mélodies riches et complexes.
2. Le bendir : Un tambour sur cadre utilisé dans de nombreuses musiques traditionnelles nord-africaines, le bendir ajoute un rythme soutenu et hypnotique à l’achewiq.
3. La flûte (tamja) : Utilisée pour sa sonorité douce et mélodieuse, la flûte accompagne souvent les chants et ajoute une dimension aérienne à la musique.
4. L’oud : Un instrument à cordes pincées, semblable au luth, qui apporte des harmonies profondes et chaleureuses.
Structure Musicale
L’achewiq se caractérise par une structure musicale riche et complexe. Les modes utilisés sont souvent basés sur des échelles pentatoniques, typiques de la musique berbère. Ce choix de mode confère à l’achewiq une sonorité distincte et reconnaissable, avec une prédominance de mélodies qui évoquent à la fois la joie et la mélancolie.
Les harmonies de l’achewiq sont généralement simples mais efficaces, souvent basées sur des accords de quinte et de quarte, ce qui permet de mettre en valeur les mélodies chantées. Les lignes mélodiques sont souvent ornementées, avec des trilles et des glissandos qui ajoutent une expressivité particulière aux chants.
L’achewiq est typiquement interprété en solo ou en chorale, avec un chanteur principal qui improvise souvent des variations mélodiques sur un thème central, tandis que le chœur répond avec des refrains répétés. Cette interaction entre le chanteur et le chœur est un élément clé de la structure musicale de l’achewiq.
Danses
Les danses associées à l’achewiq sont tout aussi importantes que la musique elle-même, ajoutant une dimension visuelle et physique à l’expérience musicale. Les danses kabyles sont généralement en cercle, symbolisant l’unité et la continuité de la communauté.
Les pas de danse sont souvent simples mais rythmés, avec des mouvements de pieds rapides et synchronisés. Les danseurs se tiennent par les épaules ou les mains, créant une chaîne humaine qui se déplace en harmonie avec la musique. Les mouvements des bras et des mains sont également importants, ajoutant une expressivité supplémentaire à la danse.
Exemples de danses
Un exemple de danse traditionnelle kabyle est la « Tissint », une danse collective qui se caractérise par des mouvements de pieds rapides et des sauts légers. Les danseurs forment un grand cercle et exécutent des mouvements synchronisés au rythme de la musique.
Pour voir un exemple de danse kabyle, vous pouvez regarder cette vidéo :
Exemples musicaux
L’achewiq a produit de nombreux morceaux mémorables au fil des ans, interprétés par des artistes renommés et des musiciens moins connus. Quelques exemples de chansons achewiq incluent :
1. « A Vava Inouva » d’Idir, une chanson emblématique qui a contribué à populariser la musique kabyle dans le monde entier :
2. « Awi Avi » de Lounis Aït Menguellet, une autre œuvre majeure de la musique kabyle :
Artistes
Plusieurs artistes ont marqué l’histoire de l’achewiq, chacun apportant sa contribution unique à ce style musical :
1. Slimane Azem : Né en 1918 à Agouni Gueghrane, Slimane Azem est l’un des pionniers de la musique kabyle moderne. Il a utilisé ses chansons pour exprimer les aspirations et les luttes du peuple kabyle.
2. Cheikh El Hasnaoui : Cet artiste a marqué la musique kabyle avec ses chansons poétiques et engagées. Né en 1910 à Taourirt Moussa, il a vécu une grande partie de sa vie en exil en France.
3. Lounis Aït Menguellet : Né en 1950 à Ighil Bouammas, Lounis est connu pour ses textes profonds et philosophiques. Il est l’une des figures emblématiques de la musique kabyle contemporaine.
4. Idir : De son vrai nom Hamid Cheriet, Idir (1949-2020) a joué un rôle crucial dans la diffusion de la musique kabyle à l’échelle internationale avec des titres tels que « A Vava Inouva ».
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5. Matoub Lounès : Connu pour son militantisme politique, Matoub Lounès (1956-1998) a utilisé sa musique pour défendre la culture et la langue kabyles.
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6. Takfarinas : Un artiste moderne qui mélange des éléments traditionnels et contemporains dans ses chansons, Takfarinas est connu pour ses performances dynamiques et son utilisation innovante des instruments.
En conclusion, l’achewiq est bien plus qu’un simple style musical ; c’est une expression vivante de l’identité et de la résilience du peuple kabyle. À travers ses mélodies envoûtantes, ses danses rythmées et ses paroles profondes, l’achewiq continue de captiver et d’inspirer des générations, maintenant ainsi en vie la riche tradition culturelle de la Kabylie.